C’est un processus gratuit de rencontre entre auteur et victime d’infraction pénale, complémentaire à la justice pénale. Ce droit existe en France depuis 2014. Il s’agit d’un espace confidentiel, sécurisé et volontaire d’échanges sur le ressenti, les émotions, les attentes des personnes concernées par les infractions pénales. Le dialogue est sécurisé par une ou plusieurs médiateurices neutres et formées. Ce n’est pas à visée thérapeutique, même s’il peut y avoir des effets thérapeutiques. Ce dispositif vise à restaurer le lien social, sans jugement, pour réparer autant les victimes que les auteurs.
Il existe différents dispositifs de justice restaurative, à savoir : - des rencontres directes (entre personnes auteure et victime d’une même affaire) - des rencontres indirectes (entre personnes auteures et victimes d’affaires différentes mais d’infractions similaires, souvent en groupe, dans la prison ou en dehors).
La justice restaurative s’applique à tout type d’infraction pénale mais les violences conjugales, entre autres, s’y prêtent moins parce qu’une des conditions sinequanone est que l’auteur se sente responsable des faits commis.
Ce processus peut intervenir à n’importe quel stade de la procédure pénale mais il faut savoir qu’il n’y a pas besoin de dépôt de plainte pour y avoir accès.
Les conditions :
- La démarche doit être volontaire de la part de l’auteur et de la victime
- L’auteur doit reconnaître les faits et sa responsabilité
- Le processus peut être stoppé à tout moment par n’importe lequel des participants - Le contenu, confidentiel, n’est pas communiqué aux juges. Et donc le processus de justice restaurative n’a aucun impact sur les peines des auteurs ou sur les dommages et intérêts des victimes. Il n’y a pas d’avantages sur le plan pénal (pas d’aménagement/remise de peine).
Plus concrètement, avant de réaliser une rencontre auteur/victime, il y a des entretiens préalables pour préparer les différents scenarios possibles. Avec l’auteur, les animateurices essaient de faire exister l’autre dans leurs questions et surtout dans ses réponses ; de remettre de l’humain là où il n’y en a souvent pas eu. Elles n’ont cependant aucune attente, ni pour l’un ni pour l’autre. Elles adoptent une posture dite de bipartialité (le même engagement avec chacun des participants). Ces entretiens préalables à la rencontre peuvent déjà être réparateurs, dans le cas où l’auteur, au final, ne souhaite pas rentrer dans le processus de justice restaurative. Cette dernière peut permettre aussi de dire des choses ou de poser des questions qui n’ont pas trouvé leur place lors d’un procès.
C’est le film Je verrai toujours vos visages de Jeanne Herry qui a permis de faire connaître la justice restaurative en France. Bien que la loi existe depuis 2014 et bien qu’elle fasse partie des politiques publiques, les subventions peinent à voir le jour pour former les animateurices, freinant ainsi le développement de la justice restaurative.
Au sein des mouvements féministes, deux courants s’affrontent à son sujet. D’un côté on trouve celles qui s’y opposent, adhérant au pénal et à la répression mais surtout justifiant que la justice restaurative cherche à réparer principalement les auteurs et que les victimes n’ont pas à les y aider. De l’autre, on trouve celles qui la soutiennent, arguant que la justice punitive ne répare ni les auteurs ni les victimes et qu’elle reproduit le modèle patriarcal. En effet, vont en prison essentiellement toujours les mêmes personnes (à savoir les hommes racisés) et surtout dans les violences faîtes aux femmes, trop peu passent par la case prison et surtout pas « les bons pères de famille »*. Même si certains arrivent à se saisir de cette case prison, on peut se poser la question de l’intérêt de regrouper entre eux des hommes qui ne se sentent que peu ou pas responsables de leurs actes. Se pose la question du renforcement de leurs croyances et des récidives qui peuvent en découler au moment de la sortie. Les études ont montré que la prison ne « soigne » pas. La justice restaurative s’appuie sur une philosophie de la réparation là où la justice pénale est portée sur la punition. |
Chez Ostara, nous sommes favorables à ce dispositif de justice restaurative qui permet d’une part de limiter les récidives chez les auteurs et d’autre part qui participe à limiter la peur chez les victimes en remettant de l’humain chez les auteurs d’infraction (et enlève l'image de monstre).
La justice restaurative apparaît pertinente surtout dans les cas de délits type vols à l’arraché, braquage, etc. là où le degré de responsabilité des auteurs est faible. Les auteurs de ce genre d’infraction n’ont souvent pas conscience qu’ils créent des traumatismes chez les victimes et ne savent d’ailleurs même pas ce qu’est un traumatisme.
En revanche, dans le cadre des violences conjugales, des violences sexuelles, nous restons plus sceptiques dans la mesure où la reconnaissance profonde de la culpabilité par les auteurs est très faible. La justice restaurative ne doit pas servir à excuser les auteurs. C’est une démarche qu’une victime peut entreprendre quand elle se pose des questions sur les raisons qui poussent les auteurs à commettre des infractions et qui ne font souvent pas sens pour les victimes. Et c'est vrai que nous trouvons la démarche indirecte plus adaptée, afin de ne pas créer un nouveau trauma et/ou une nouvelle possible manipulation des auteurs.
Qu'en pensez vous ?
*En bons pères de famille – Rose Lamy
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